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Trouble ou symptôme

deborah allio

L’éducation thérapeutique (ETP) associée aux thérapies cognitivo-comportementales (TTC) a envahi le champ de la santé mentale. La loi de 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) l’a introduite par son article 84 du droit français. Cette démarche de réhabilitation et de rééducation régit la politique de traitement du trouble du patient qui se décline sur le mode de l’excès. Le trouble obsessionnel compulsif (TOC), de l’anxiété généralisée (TAG), du déficit de l’attention avec hyperactivité (TDAH), le trouble de l’humeur (HYPOMANIE) est à éradiquer.

 

Deux nouvelles versions de classifications des troubles sont utilisées sur le plan international : le Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux (DSM 5), développé par l’Association Américaine de Psychiatrie, et le chapitre 6 de la Classification Internationale des Maladies (CIM 11), développée par l’Organisation Mondiale de la Santé. Le trouble F de la CIM 11 est un nom de jouissance qui s’inscrit sous la forme d’un code principal (en dizaines et unités) et d’un code secondaire (en fractions) dans le dossier patient informatisé (TOC : F42, TAG : F41.9, TDAH : F90, HYPOMANIE : F30.1)

 

Le diagnostic ne se fait plus désormais sous transfert. Les soignants soumettent des questionnaires aux patients pour répertorier leurs dysfonctionnements. Ils les intègrent ensuite dans des programmes de remédiation cognitive qui ciblent la réinsertion sociale. Le programme d'information sur la maladie, Psychose, Aider, Comprendre, Traiter (P.A.C.T.), conçu comme un outil pédagogique, utilise comme support les DVD élaborés par le laboratoire pharmaceutique Janssen-Cilag. Les exercices pratiques ambitionnent d’apprendre aux patients à reconnaître leurs troubles invalidants et à renforcer leurs comportements d’adaptation à la vie quotidienne en usant de casques de réalité virtuelle. La thérapie par exposition, utilisée dans les séances de débriefing de l’armée française pour les militaires ayant subi un stress post-traumatique, se répand donc en psychiatrie.

 

Le protocole de soin standardisé empêche le soignant de se laisser enseigner par le patient en restant au plus près de ses signifiants, de ses formules et de ses solutions singulières. Le trouble est interprété. Lire un symptôme consiste néanmoins, indique Jacques-Alain Miller, à passer « de l’écoute du sens à la lecture du hors-sens » [1]. La jouissance contenue dans le symptôme étant indélébile, il s’agit plutôt d’accompagner le parlêtre à apprendre à s’en servir et éventuellement à s’en passer.

 

 

[1] Miller, J.-A., « Lire un symptôme », Mental n°26, juin 2011, p. 57.

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